Un internaute qui entre des symptômes dans la version anglophone du moteur de recherche se voit désormais proposer une liste de pathologies pouvant correspondre à son cas. Le corps médical émet de «fortes réserves».
Surfant sur l'appétence des internautes pour les informations relatives à la santé - 30% des Français se seraient déjà renseignés par ce biais selon une étude récente - Google présentait lundi un nouvel outil qui risque de conforter les hypocondriaques dans leur névrose. Le géant américain propose désormais à un internaute faisant des recherches sur un symptôme une liste de pathologies connexes. Par exemple, si l'internaute entre l'expression «douleur abdominale du côté droit», le moteur va lui suggérer, sous le champ de recherche, «appendicite», «kyste ovarien», «hernie», «calculs rénaux» et «syndrome de l'intestin irritable». Et impossible d'échapper à ce diagnostic algorithmique, Google n'ayant apparemment pas prévu de bouton «masquer» pour ce service qui n'est pour l'instant disponible que depuis le territoire américain.
Si l'on peut imaginer qu'une personne s'interrogeant sur des symptômes soit heureuse de trouver ce nouveau degré d'information, la sélection, quant à elle, rend plus sceptique. Car l'internaute a-t-il vraiment conscience que «cette liste n'est pas rédigée par des médecins et ne tient, évidemment pas lieu de conseils provenant d'experts médicaux», comme le précise Google sur son blog - mais pas en clair à côté des résultats de recherche? (il existe bien un lien «Comment ça marche?» mais il est probable que la majorité des internautes le survoleront sans s'y arrêter).
Le résultat s'appuie en effet tout simplement sur les associations de recherches les plus fréquentes: si, pour 1000 recherches sur «mal de crâne», 60% sont suivies sur le même ordinateur d'une recherche sur «migraine», alors cette pathologie fera partie de la liste désormais proposées en association avec «mal de tête». Et ce, quelle que soit la pertinence des sites les plus consultés par les internautes - Wikipédia compris.
Au Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom), on émet «des réserves fortes» devant cette initiative qui «profite d'un créneau d'inquiétude et d'interrogation, dans un contexte où l'accessibilité à un médecin se réduit», explique le vice-président de l'organisme Jacques Lucas. «Avant, les gens fonctionnaient par bouche-à-oreille ou bien consultaient des encyclopédies médicales, des manuels. Mais au moins, la rédaction de ces derniers avait été supervisée par des médecins», rappelle le médecin, qui est délégué aux systèmes d'information en santé au sein du Cnom.
Pas question néanmoins de nier à Internet une utilité dans l'information des patients. «Nous recommandons simplement au public de vérifier la pertinence des sites qu'ils consultent, en cherchant par exemple si l'information a été rédigée ou validée par des médecins». C'est dans ce but qu'un label «Health on the net (HON)» a été créé à destination des sites web santé en 2007. «Mais il reste peu connu du public et mal référencé», déplore Jacques Lucas.
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