On croyait que ce n'était qu'un refrain. Mais les comparaisons internationales le confirment : le niveau des élèves baisse.
Lors de ses vœux au monde de l'Éducation, Nicolas Sarkozy s'est félicité jeudi 5 janvier que les programmes mis en place en 2007-2008 aient opéré un recentrage sur les apprentissages fondamentaux à l'école primaire.
En juin 2011, le ministre de l’Éducation nationale Luc Chatel s’était réjoui de la hausse du niveau des élèves de primaire, en se fondant sur des évaluations passées par les écoliers de CE1 et de CM2.
Autant de déclarations qui donnent l’impression que les résultats des écoliers français sont sur une pente ascendante.
Cependant, comme elles n’existent que depuis 2008, les évaluations de CE1 et CM2 ne permettent pas de mesurer l’évolution du niveau des élèves sur le moyen ou le long terme.
Lorsque l’on se penche sur les résultats de la France dans les études internationales, on découvre à l’inverse que le niveau des élèves baisse, en comparaison avec ceux des autres pays développés.
1. Une tendance à la baisse pour la lecture et les maths
Les études dont on dispose portent surtout sur la lecture et les mathématiques. Au-delà de ces deux variables, difficile d’évaluer, par exemple, l’évolution de la culture générale des élèves.
Les données scientifiques ne permettent pas non plus de comparer le niveau des élèves entre 1900 et aujourd’hui, faute de paramètres stables, mais seulement sur une vingtaine d'années.
En 2011, le "Portrait social de la France" publié par l’Insee constate que "depuis une dizaine d’années, le pourcentage d’élèves en difficulté face à l’écrit a augmenté de manière significative et près d’un élève sur cinq est aujourd’hui concerné en début de 6e." En clair, 20% des élèves ont aujourd’hui de gros problèmes avec la lecture quand ils entrent en 6e, contre 15% en 1997.
"À l’école primaire, on voit bien, depuis les années 1990, une tendance à la baisse du niveau des élèves", confirme le chercheur Bruno Suchaut, directeur de l’Institut de Recherche sur l’Éducation (Irédu), affilié au CNRS.
Pour les collégiens français, les études internationales ne sont guère plus rassurantes. Ainsi, l’enquête PISA, menée tous les trois ans auprès de jeunes de 15 ans dans les pays industrialisés, indique que le classement des collégiens français pour la culture mathématique a régressé entre 2003 et 2009. En 2003, le score des Français les situait au-dessus de la moyenne de l’OCDE, alors qu’en 2009, ils se placent dans la moyenne.
Pour la compréhension de l’écrit, les collégiens français n’étaient dépassés que par la Finlande, la Suède et les Etats-Unis dans un classement de 24 pays en 1990. En 2006, ils arrivent au 27e rang sur 44 pour une étude comparable.
Plus généralement, les comparaisons internationales notent une dégradation depuis 1990 du niveau des élèves français par rapport aux autres pays développés.
2. C’est surtout le niveau des élèves les plus faibles qui baisse
En fait, plus que le niveau général des élèves, ce sont les écarts entre les élèves qui s’accentuent.
"Quand on s’intéresse aux élèves qui n’ont pas de retard scolaire, ils sont plutôt bien placés dans les études Pisa, mais il y a plus d’élèves faibles ou très faibles qu’avant", constate Bruno Suchaut. C’est ce creusement du fossé entre les bons et les mauvais élèves qui fait baisser la France dans les classements internationaux.
Une donnée confirmée par l’Insee : "Si le niveau de compréhension de l’écrit des élèves moyens n’a pas évolué, la plupart des évaluations témoignent d’une aggravation des difficultés parmi les élèves les plus faibles". L’institut souligne que "les compétences langagières (orthographe, vocabulaire, syntaxe) sont en baisse, ce qui explique l’aggravation du déficit de compréhension des textes écrits parmi les élèves les plus faibles."
3. Le milieu social a de plus en plus d’influence sur le niveau des élèves
Autre constat inquiétant des études internationales, l'influence croissance du milieu d'origine des élèves sur leurs résultats scolaires.
L’étude PISA 2009 souligne que "c’est dans les collèges en zones d’éducation prioritaire que l’augmentation des difficultés est la plus marquée : près d’un tiers de ces collégiens éprouve des difficultés face à l’écrit, contre un quart il y a dix ans".
En France, le statut économique, social et culturel des parents explique une plus grande part de la variation des scores des élèves qu’en moyenne dans les pays de l’OCDE. En clair, quand on vient d'un milieu défavorisé, on a moins de chances de réussir en France qu'ailleurs.
Ainsi, le niveau moyen des élèves français a tendance à décliner non pas parce que celui de tous les élèves baisse mais parce que les écarts entre les forts et les faibles se creusent et que les inégalités sociales s'accentuent.
par Béatrice Roman-Amat
quoi.info